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Un jour en Haïti
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27 juin 2011

Une semaine plus tard...

Une longue semaine sans nouvelles. Cette fois-ci pas à cause d'un manque d'électricité ou de connexion internet mais plutôt d'une redondance (pas négative) dans ce que je fais et donc pas envie de me répéter.

Je suis de plus en mode "écriture de mémoire" et passe donc une partie de mes journées à écrire et à faire des recherches sur le net. J'ai d'ailleurs à ce propos un questionnaire que je fais remplir à des personnes qui ont l'habitude de donner (de leur temps, de l'argent, des biens...) et qui aurait un peu de temps à me consacrer. Pour ceux qui ne l'ont pas encore reçu, le voici en copie ci-dessous. Il faut vous suffit de faire un copier/coller dans un traitement de texte puis de répondre en dessous de chaque question. Sinon vous m'écrivez un mail et je vous envois le document Word que j'ai écrit à ce propos.

 

Questionnaire donateurs

 

Pourquoi donner ?

 

                Je suis actuellement en stage en Haïti pour 5 mois. Ce stage s’inscrit dans le cadre de la préparation d’un Master à l’Institut catholique de Paris sur le thème « Solidarités, action internationale et économie solidaire ». Durant mon séjour, je dois écrire un mémoire sur mon expérience ici et un problème que j’aurais rencontré.

                Je travaille au sein d’un orphelinat, qui reçoit beaucoup d’aide de la part d’organisations humanitaires et de particuliers. J’ai pu constater les problèmes que cela engendrait et les dérives que cela occasionnait. J’ai donc eu l’idée et l’envie de travailler sur la différence de perception que peuvent avoir ceux qui donnent et ceux qui reçoivent. Ma problématique est la suivante : dans quelle mesure les attentes des donateurs et des bénéficiaires se rencontrent-elles ?

                J’ai été surpris de constater que ces aides, qui, comme on peut le supposer, partent d’un bon sentiment et sont pensées comme nécessaires, peuvent engendrer des problèmes et donner lieu à des dérives que je n’aurais pas soupçonnées, en tout cas pas d’une telle ampleur (la population qui se jette sur nous lors d’un déchargement de marchandises destinées à l’orphelinat, par exemple). D’où une réflexion sur la perception du don par les récipiendaires : que signifie « recevoir de l’aide », comment est reçu cette aide extérieure ? Mais aussi une interrogation sur ce que signifie donner : pour les gens donnent ? Dans quel but ?

                L’idée est donc de soumettre deux questionnaires, l’un à des donateurs et l’autre à des bénéficiaires afin de me faire une idée plus précise de ce qui pousse les gens à aider et de la manière dont les personnes qui reçoivent cette aide la perçoivent.

                Merci pour le temps que vous passerez à remplir ce questionnaire qui me sera d’une grande utilité lors de la rédaction de mon mémoire.

                Ce questionnaire est bien entendu anonyme et je ne fournirai à personne le contenu de cet entretien en tant que tel. Il s’agit uniquement pour moi d’un matériau de recherche qualitative que je compte utiliser de manière parcellaire dans le cadre de mon mémoire.

 

Sexe :                   M                           F

Âge :

Catégorie socioprofessionnelle :

Nationalité :

1. Est-ce que vous donnez ? Si oui, comment sélectionnez-vous les personnes et/ou institutions (en fonction de la cause défendue, par ouï-dire…)

2. Que donnez-vous ? Du temps en tant que bénévole, des vieux objets que vous n’utilisez plus, de l’argent… ?

3. Pourquoi donnez-vous ? Qu’est ce vous pousse à donner ? (convictions personnelles, religieuses…)

4. Donner vous de façon régulière, chaque mois ou au cas par cas, en fonction des crises humanitaires ?

5. Si mensuellement, depuis combien de temps ?

6. Privilégiez-vous les petites organisations que vous connaissez bien (association de quartier) ou les grosses ONG (Croix Rouge, MSF, CCFD) ?

7. Qu’est ce qui fait que vous allez donner à une organisation plutôt qu’à une autre ?

8. Est-ce que vous vous renseignez sur la finalité de votre don ou est-ce que vous faites confiance à l’organisme auquel vous donnez ?

9. Est-ce que votre façon de donner a évolué avec le temps ? (donner plus, donner moins, donner du matériel plutôt que de l’argent…)

10Donnez-vous plus lorsque vous entendez parler d’une catastrophe humanitaire dans les médias ou via de la famille ou des amis ?

11. Pensez-vous votre action bénéfique au final ?

12.   Avez-vous déjà participé à un projet humanitaire ou de solidarité dans un PVD (Pays en Voie de Développement) ?

13.   Si oui, cela a-t-il changé votre façon de donner ?

14.   Que pensez vous de le l’action humanitaire en général ? La trouvez-vous adapter aux besoins des populations cibles ?

15.   Autres remarques…

 

Merci pour votre participation

 

Dimanche 19 juin

 

A défaut d'activités à décrire pour la journée, une petite réflexion personnelle sur l'humanitiare.

 

Pour travailler dans l'humanitaire, la bonne volonté est loin de suffire. Il faut avoir en plus des capacités d'adaptation, de remise en question, de tolérance, de pédagogie, d'analyse, être capable d'oublier tout ce que l'on sait pour regarder une situation avec un regard nouveau...

 On arrive généralement dans des lieux sans grand confort. Il faut aimer côtoyer toutes sortes d'insectes et de bestioles en tout genre, supporter la chaleur, manger souvent la même nourriture, être un étranger au regard de tous...

Les formations telles que je suis à Paris permettent d'appréhender ce milieu complexe en nous préparant « théoriquement » aux situations qui nous attendent. Mais chaque pays est différent avec sa propre culture, sa manière de vivre intrinsèque et aucune formation en remplacera une immersion sur place.

En plus de facultés d'adaptation, il faut réussir à s'intégrer au sein de la population locale. Il faut être bien conscient que nous ne sommes ni les premiers, ni les derniers « blancs » à venir. Nous ne sommes que de passage. Les autochtones ont déjà vu passer de nombreux étrangers qui amènent avec eux leurs promesses, leurs projets et certains en sont désabusés et cela se ressent dans le regard qu'ils portent sur nous comme si celui-ci signifiait « encore un autre qui vient, qu'est ce qu'il va bien pouvoir faire ». Ils en ont marre de voir des blancs venir, monter un projet, faire des photos et repartir...

A cela, il faut prendre conscience qu'aujourd'hui, l'humanitaire et les projets de solidarités sont à la « mode » et que chacun veut prendre part à l'aventure et apporter sa contribution d'une manière plus ou moins désintéressée.

Dans ce grand monde de la solidarité internationale, se côtoient donc diverses personnalités avec des envies et des ambitions différentes. On en oublie parfois que ces projets ont pour but d'aider une population cible avant de s'aider soi-même. Il faut savoir se détacher de tout nos à priori, de nos réflexes antérieurs et accepter de découvrir quelque chose de nouveau, quelque chose de différent même si cela peut déranger au début. Des pratiques qui nous paraissent étranges lors de notre arrivée deviennent, avec le temps, normales voir habituelles. Pour cette raison, il est important de rester plusieurs mois sur place avant d'entreprendre (souvent trop rapidement) des actions, des projets.

La plupart des petites associations vous dirons que le projet a été étudié en concertation avec la population locale. Cela est vrai, on ne peut pas penser que les bénévoles en France ont de mauvaises intentions. Cependant, ils ont souvent du mal à imaginer qu'un autochtone verra toujours dans la personne d'un blanc, une rentrée d'argent potentiel. Il dira donc facilement OUI à un projet de cette façon. Même si le projet n'est pas utile à la communauté, il engendrera probablement des rentrées d'argent de manière collatérale...

 On ne le dira jamais assez mais une bonne préparation est nécessaire avant un départ dans un pays aussi différent que le sien comme Haïti.

Les gens ont souvent des bonnes intentions mais ils imaginent mal les besoins des gens sur place.

Quand on part en mission humanitaire, il faut accepter de s'ouvrir aux autres et se remettre en question.

Mais cela reste néanmoins une expérience extrêmement enrichissante et valorisante personnellement et humainement. Une fois rentré en France, il est parfois difficile d'expliquer à ses proches ce que l'on a vécu tellement le décalage est grand. On a beau en parler et montrer des photos, il est dur de retranscrire son ressentit.

Lundi 20 juin

 Soeur Flora nous envoi chercher une dame à La Hatte. Nous partons à 8h entre français pour une petite excursion rapide de l'autre côté de l'île. Le trajet se passe sans problème et nous accostons entre deux bateaux à voiles en train d'être rempli de mangues. Celles-ci seront emportées puis vendues aux Cayes. Nous trouvons rapidement la personne en question qui a des difficultés pour marcher. De retour à l'orphelinat, journée tranquille et sans péripéties.

 Mardi 21 juin

 Le 21 juin en France, c'est la traditionnelle fête de la musique, ici, il n'y a rien de spécial. Il faut dire qu'en Haïti, c'est chaque jour la fête de la musique.

 C'est aussi jour d'examens pour les 6èmes années (CM2 chez nous) qui finissent ainsi le primaire. C'est un examen national officiel et donc par conséquent étroitement surveillé comme le montre la présence de deux policiers armés et en uniforme devant l'entrée de l'école des Frères. Tous les 6èmes années de l'Île à Vache sont venu ici pour plancher durant ces quelques jours sur les examens.

 Devant l'école, une influence inhabituelle de marchandes qui essaient de profiter de l'occasion pour proposer à manger et à boire aux élèves en sortant.

 S'ensuivent trois aller retour en bateau aux Cayes tout au long de la journée. Manuel en tant que capitaine et moi toujours en tant que marin pour l'aider : à l'arrivée et au départ pour mouiller le bateau et durant le trajet pour repérer les éventuels obstacles devant le bateau.

 Un premier trajet pour aller chercher de la nourriture à Caritas : des sacs de pois, des sacs de riz, des boîtes de sardines... Il faut trouver une voiture pour emmener ces quelques 500 kgs de nourriture au wharf. Nous ramenons aussi, Tom, un américain du Michigan qui vient rendre visite à un des jeunes de l'orphelinat, Vilarson.

En arrivant au wharf, la Soeur nous demande de repartir chercher le magistrat (maire) ainsi qu'un représentant de l'ambassade de France venu suivre l'avancé d'un projet d'assainissement sur Madame Bernard. On sort les gilets de sauvetages (pour les officiels) et c'est reparti pour un retour mouvementé entre les vagues. Heureusement que l'on est sorti avec le gros bateau.

Le temps de manger rapidement, de se doucher pour enlever le sel accumulé durant ces deux voyages et il nous faut déjà repartir pour ramener tout ce beau monde aux Cayes. Ce dernier retour se fera de nuit. On peut alors admirer à l'arrière du bateau une longue traînée lumineuse qui semble nous suivre. Il s'agit en fait de planctons qui s'illuminent sous l'action de l'hélice du moteur. Un spectacle magique que je ne me suis pas lassé de contempler durant tout le trajet du retour.

 Mercredi 22 juin

 Dernière journée d'examen, ce soir c'est les vacances. Ce sera épreuve de mathématiques pour finir cette session 2011.

 Aujourd'hui, nouveau trajet aux Cayes mais cette fois-ci avec Magaly et Thierry. Retour chez le mécanicien pour changer quelques pièces du pied du moteur du bateau, achat de cadenas pour l'orphelinat. Magaly et Manuel vont chez un vendeur d'électroménager afin de consulter les prix pour un frigo. Ils avaient un budget de 300 $ US, le vendeur leur annonce comme premier prix 2000 $ US et pour la taille que l'on veut, 3000 $ US. Autant dire qu'il manque un zéro et que ce prix ne semble pas raisonnable. De mon côté, je retourne au BTI faire des photocopies. Maintenant que nous n'avons plus d'encre dans l'imprimante de l'orphelinat, le BTI est devenu ma destination privilégiée aux Cayes. Aujourd'hui, ce sera pour imprimer les bordereaux pour l'école. Ils contiennent pour chaque classe le coût de la scolarité avec les différentes échéances pour payer, la liste des livres à se procurer, l'uniforme obligatoire ainsi que les cours de catéchisme...

 Maintenant que c'est les vacances, les enfants passent leur temps dehors à jouer et à s'amuser entre eux. Les occupations sont restreintes et chacun se transforme en bricoleur de cerf-volant. On peut donc voir depuis quelques jours ces oiseaux de bois et de papier voler haut dans le ciel au dessus de Madame Bernard et de l'orphelinat. Ce sera à qui aura la plus longue ficelle afin de toucher les étoiles. :-) Comme quoi, il n'y a pas qu'a Kaboul que l'on peut contempler ce spectacle... (pour ceux qui ne comprennent pas, lire le livre « Les Cerfs-volants de Kaboul ».

 Jeudi 23 juin

 Je vais faire un tour sur le chantier de l'école qui avance mieux maintenant que les cours sont terminés. Certaines des jeunes de l'orphelinat maintenant en vacances se font embaucher en tant que manœuvre à la journée pour porter des brouettes de parpaings, de ciments...

 Vendredi 24 juin

 Souvenez-vous, il y a de cela quelques semaines, nous étions allé visiter un moulin à Grande Plaine. Celui-ci ne marchait à cause d'un boulon manquant. Aujourd'hui, on profite du trajet à Canoberg avec les enfants handicapés pour continuer à pied vers Soulette et aller visiter deux autres moulins accompagné de Nestor, le président du COGEDI. Ce moulin fonctionne et nous posons toutes les questions que nous voulons. Le projet semble tenir la route, il ne reste maintenant plus qu'a attendre la prochaine récolte de maïs. Pour l'instant, les silos n'ont pas encore servit à stocker du maïs.

 Tandis que Thierry repart à Canoberg s'occuper des enfants handicapés, je me dirige avec Manuel vers Troumilieu au milieu d'une mangrove. Nous voulions tenter notre chance en essayant de ramener un peu de poisson mais le manque de visibilité et l'absence de gros poissons nous firent revenir bredouille. Nous avons néanmoins pu admirer une épave de bateau colonisée par les algues en tout genre et quelques petits poissons...

 Nous revenons juste à temps pour attraper le bateau qui repart de Canoberg et rentrer à Madame Bernard.

 Samedi 25 juin

 La Soeur veut aller aux Cayes pour se reposer durant quelques jours. Elle désire partir juste après la messe du matin soit sur les coups de 7h15. Nous nous levons à 6h15 avec Manuel afin d'avoir le temps de préparer le bateau, de le nettoyer, de monter le moteur, de prendre de l'essence. Le trajet se passe sans trop de problèmes malgré les vagues et le fait que nous naviguons avec le petit Saint-François. Une fois arrivée aux Cayes, nous prenons juste le temps de refaire le plein et d'acheter de l'huile et nous sommes repartis.

Aujourd'hui, Vilarson veut faire visiter l'Île à Vache à Tom pour son dernier jour ici. Nous préparons l'autre bateau avec Manuel et nous repartons tous ensemble vers 11h. Direction le premier îlet des amoureux pour se baigner puis le second pour voir l'envol des oiseaux qui ont pris l'habitude d'y faire bronzette. Après un rapide passe à Canoberg pour acheter du pain auprès d'une marchande, nous continuons la journée par les grottes et la plage d'Abaka Bay. C'est toujours aussi sympa même après trois mois de se baigner dans une eau aussi chaude et aussi claire.

Il reste encore la plage de Lance à l'eau ainsi que l'hôtel de Port Morgan à faire visiter à Tom afin qu'il puisse achever sa visite de cette partie de l'île. Sur la plage de Lance à l'eau se prélassent deux Bulgares que les garçons on tôt fait d'aborder. Ce qu'ils ne comprennent pas c'est que les touristes ont tout sauf envie de se faire draguer par tout les garçons qui passent... Mais bon qui ne tente rien n'a rien comme on dit !

En revenant vers Madame Bernard, on passe devant Grand Sable et on trouve les enfants en train de se baigner avec Magaly et Thierry. On en profite pour embarquer tout ce beau monde pour la plus grande joie des petits. Seul Thierry préfère profiter de la fraîcheur de cette fin de journée pour rentrer à pied.

Malgré trois mois au soleil, ma peau est toujours sensible au soleil et si j'oublie de mettre de la crème, le soleil lui n'oublie pas de brûler ma peau.

Maurice, un peintre, a commencé à peindre des fresques répresentant des scènes de la vie quotidienne Haïtienne sur les murs de l'orphelinat.

 Dimanche 26 juin 2011

 Et voilà le séjour de Tom qui est terminé, il ne reste plus qu'à le raccompagner aux Cayes afin qu'il puisse prendre le bus pour Port au Prince. Malheureusement, les réserves d'essence de l'orphelinat sont à sec et je parcours Madame Bernard avec Manuel à la recherche du précieux liquide. Nous en trouvons juste ce qu'il faut pour faire l'aller jusqu'au Cayes. On achètera le reste aux Cayes. En parcourant les rues des Cayes, on se rend facilement compte que l'on est dimanche. Les rues sont presque désertes et les échoppes vides. Il est ainsi plus facile de se déplacer en moto taxi.

 Le retour est quelque peu mouvementé, le vent s'est levé et les vagues sont plus grandes. Le bateau de sacré bonds au dessus des flots et manque à plusieurs reprises de chavirer (ça c'est pour le côté mélodramatique mais ce n'était néanmoins pas très rassurant).

 Tous ces trajets aux Cayes avec Manuel m'ont fait découvrir une nouvelle vocation pour la navigation. Il faut néanmoins aimer être secoué et couvert de sel à la fin de la journée :-)

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Commentaires
J
bonjour<br /> merci pour ces réflexion humanitaire qui sont très en accord avec mon sentiment<br /> Je vais répondre tranquillement à ton questionnaire mais je me permettrai de le faire aussi par un long "autres remarques"<br /> Je t'enverrai tout cela par email dès que j'aurai eu le temps de m'y consacrer<br /> J'espère pouvoir dialoguer plus amplement avec toi voire avoir une copie de ton mémoire si tu veux bien car je suis moi même en réflexion sur le sujet, avec mes 50 ans et mes années d'expériences plus ou moins réussie en humanitaire.<br /> Merci<br /> à bientôt<br /> jm costini
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